Eléments d’analyse des annonces de MACRON sur le pouvoir d’achat (Note du pôle économique CGT)

Mercredi 12 décembre 2018, par CGT CAPGEMINI // L’actualité Sociale

Quelques éléments d’analyse des annonces du Président de la République

Introduction
La tonalité générale des annonces faites par le Président des riches reste dans une logique libérale de favoriser la politique de l’offre au service des entreprises, en maintenant le cap sur la volonté de ne pas permettre un meilleur partage des richesses créées par le travail via la revalorisation du SMIC, des salaires, des pensions de retraite et des minima sociaux.

D’autre part, avec ces annonces, c’est encore 100 % de cadeaux et de réponses aux exigences des employeurs et pas/ou aucune réponse pour les salariés, retraités, privés d’emploi...

I. Concernant le nouveau montant du SMIC, qui au final n’est pas une hausse
Ce qui était « prévu » : Il n’y a pas en réalité d’augmentation du SMIC au-delà de l’augmentation légale de 30 €. au premier janvier.

L’augmentation de 100 € correspond à 20 € d’augmentation déjà prévue + 80 € d’augmentation de la prime d’activité (ex. prime pour l’emploi) qui est une prestation sociale sous conditions de ressources financée par le budget de l’Etat pour les salariés ayant un revenu d’activité jusqu’à 1,33 SMIC (1 500€ par mois).

Dans son programme, Macron avait prévu une hausse de la prime d’activité de 80 € au cours du quinquennat.

En 2018, elle a augmenté sauf erreur de 20 €.
La hausse à venir (60 €) devait donc être répartie sur la fin du quinquennat.

Avec son annonce, Macron ne fait qu’anticiper la hausse prévue avec un surplus de 10 €.
100 € annoncés – 30 € (hausse du SMIC) – 60 € (prime d’activité) = 10 €

Pour information, les employeurs ne versent quasiment plus de cotisations sociales pour un-e salarié-e rémunéré-e au SMIC.
A noter aussi que la prime d’activité n’est pas indexée sur l’inflation et risque donc ne pas augmenter
d’ici la fin du quinquennat...Or, l’inflation glissante sur les 12 derniers mois se situe autour de 1,9 %.
Ce qui signifie qu’en moyenne les prix à la consommation progressent de quasiment 2 % avec de fortes disparités en fonction des produits. En effet, les produits de première nécessité ou ceux qui représentent les dépenses incompressibles des ménages progressent encore plus fortement.

II. CSG des retraités uniquement
Pour rappel, la CSG des retraités comporte actuellement 3 tranches, dépendant du revenu fiscal de
référence des personnes percevant une pension de retraite. Rappelons que contrairement aux
cotisations sociales qui dépendent de la rémunération individuelle de la personne, la CSG des retraités dépend des revenus de l’ensemble du foyer fiscal.

Le barème est actuellement le suivant (revenu fiscal de référence annuel pour une personne seule –
soit 1 part) :

  • Jusqu’à 11 018 € , exonération,
  • De 11 019 € à 14 403 € : CSG au taux réduit de 3,8 % (+ 0,5 % de CRDS)
  • A partir de 14 404 € : CSG au taux normal de 8,3 % (+ 0,5 % de CRDS)

La proposition du Gouvernement consiste à créer une nouvelle tranche au taux de 6,6 % (soit l’ancien taux normal avant l’augmentation de 1,7 % décidée au PLFSS 2018), ce qui correspondrait a priori à un revenu fiscal de référence de l’ordre de 24 800 € pour une personne seule.

Selon Les Echos, cette mesure coûterait 1,5 Md€ en année pleine et serait financée par l’ACOSS qui pourrait être amenée à s’endetter pour compenser les effets de cette mesure, qui impacterait essentiellement en premier examen le fonds de solidarité vieillesse.

III. Concernant les exonérations des heures supplémentaires
Pour rappel la « désocialisation » des heures supplémentaires était déjà acté, il s’agit donc également
de les défiscaliser.

Cette défiscalisation a déjà été mise en œuvre par la loi TEPA, quel en fut le bilan ?

  • Dans certaines branches comme celle de la métallurgie, ces exonérations conduisaient à un volume d’heures supplémentaires effectuées qui représentait l’équivalent de 20 000 emplois à temps pleins.
  • Avec les ordonnances Travail et la Loi El Khomri, les entreprises ont la possibilité d’augmenter de manière substantielle le temps de travail. Dans la métallurgie toujours, le patronat peut établir le contingent d’heures supplémentaires à 220 heures par an ou encore le « plafonner » à 175 heures mais en calculant le temps de travail sur 3 ans.

Cette mesure avait prouvé son inefficacité lors du quinquennat de Sarkozy passant du travailler plus pour gagner plus au travailler plus pour gagner moins.

Pour rappel, un rapport parlementaire avait conclu en 2011 que ce dispositif coûtait en moyenne 4,5 milliards d’euros de manque à « gagner » pour les finances publiques soit 0,23 % du PIB à l’époque pour un gain de 0,15 % du PIB.

Ainsi, avec la reprise des anciennes mesures par le Président, il est fort probable que comme lors de sa mise en place il y a quelques années, cette mesure va se substituer aux augmentations de salaires, aux créations d’emplois et va accentuer l’intensification et la dégradation des conditions de travail.

IV. Fiscalité environnementale et prix à la pompe
Le gouvernement a annoncé qu’il ne procéderait pas à la hausse des taxes sur les carburants au 1 er
janvier 2019. Mais attention !

La baisse des prix à la pompe depuis quelques jours ce n’est pas du fait de l’action du gouvernement ou de la communication de certains PDG d’entreprises de la grande distribution. La baisse provient de la spéculation boursière sur le cours du pétrole qui a vu le prix du baril (Brent) passer d’environ 76$ à 51$, soit une baisse de 33 % du prix du baril, ce qui est d’ailleurs très loin d’être le cas de la baisse entraperçue à la pompe.

V. La calculatrice du pôle éco n’arrive plus à additionner les milliards d’euros d’aides et de
cadeaux fiscaux accordés aux entreprises et aux ménages les plus fortunés

200 milliards chiffres estimés en 2013
+ 20 milliards « Pacte de responsabilité » avec l’introduction du CICE entres autres,
+ 20 milliards en 2019 avec le maintien du CICE et sa « pérennisation en baisse de cotisations sociales pour les employeurs »,
+ 4 milliards de suppression de l’ISF,
= 244 milliards d’euros

Ainsi, d’après nos estimations, les exonérations de cotisations sociales, comme nous les appelons communément, représentent 70 à 85 milliards d’euros par an.

A noter, hier, le ministre des Comptes publics a annoncé que le déficit dépassera les 3 % (critères de Maastricht) en raison du CICE qui représenterait une « dépense » de 0,9 points de PIB, de plus les annonces d’hier sont des dépenses nouvelles venant accentuer ce déficit => Pour les employeurs il est possible de franchir les critères de Maastricht ?

Conclusion :
Ces mesures ne coûteront rien aux entreprises. De plus, aucune nouvelle ressource n’est prévue donc de façon mécanique ces mesures seront en partie au moins financées par l’impôt, ce qui est pour le moins paradoxal.

Notons aussi que rien n’est dit sur les services publics, la sécurité sociale. Il faut même s’attendre à l’accentuation de la dégradation de la situation puisque les ressources seront largement impactées par ces mesures (défiscalisation, désocialisation,...)

Les annonces faites hier confirment le maintien du cap d’une politique économique libérale dont les conséquences néfastes sont dénoncées depuis très longtemps par notre organisation.

Pôle Economique confédéral CGT
Montreuil le 11 décembre 2018